Ouanaminthe, 2 mai 2025 – Une délégation gouvernementale haïtienne s’est rendue ce vendredi à la frontière haïtiano-dominicaine de Ouanaminthe pour évaluer la situation critique des centaines d’Haïtiens refoulés quotidiennement par la République dominicaine. Le Centre des Ressources Frontalières, principal point d'accueil de la région, reçoit désormais entre 300 et 400 personnes par jour, dans des conditions de plus en plus alarmantes.
La mission officielle, composée du Ministre de la Santé publique et de la Population, Dr Sinal Bertrand, du Ministre délégué chargé de la Solidarité et des Affaires humanitaires, Herwill Gaspard, de la Ministre des Haïtiens vivant à l’étranger, Kathia Verdier, ainsi que du Directeur général de la Protection civile, Emmanuel Pierre, avait un double objectif : évaluer la situation humanitaire et lancer des initiatives sanitaires pour les plus vulnérables.
Selon les informations communiquées par l’Office National de la Migration (ONM), plus de 400 ressortissants haïtiens ont été accueillis à la frontière de Ouanaminthe jeudi soir. « La situation devient de plus en plus intenable », a déclaré Joseph Youdex, coordonnateur par intérim de l’ONM à Ouanaminthe. « La majorité de ceux qui nous arrivent sont en situation de grande détresse : des femmes enceintes, des nourrices, des enfants en bas âge, des personnes malades. Beaucoup sont démunis, physiquement affaiblis, psychologiquement choqués. »
M. Youdex précise que cette vague de déportations s’est intensifiée depuis la fin de l’année 2024, à la suite d’un durcissement des politiques migratoires dominicaines. « Depuis fin avril, nous avons atteint une moyenne d’au moins 400 déportés par jour. Nos capacités sont largement dépassées. »
Face à cette urgence, les autorités haïtiennes ont tenté d’apporter une réponse multisectorielle. En marge de cette visite, le Ministre de la Santé, Dr Sinal Bertrand, a procédé au lancement officiel du centre pédiatrique à l’hôpital de Ouanaminthe. Il a également annoncé l’ouverture prochaine d’un hôpital de référence dans la région, destiné à renforcer l’accès aux soins de santé primaires.
« Nous voulons que toutes les femmes enceintes et tous les enfants reçoivent les soins nécessaires, gratuitement et sans délai », a déclaré Dr Bertrand, visiblement préoccupé par l’ampleur de la crise.
L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), l’organisation *Succès* et plusieurs acteurs de la société civile apportent déjà un soutien sur le terrain, en fournissant nourriture, hébergement temporaire, kits d’hygiène, et premiers soins. Mais les ressources demeurent insuffisantes face à l'afflux constant.
Très engagée, la Ministre des Haïtiens Vivant à l’étranger, Kathia J. E. Verdier, a partagé un témoignage poignant lors de sa visite. « Ce que nous voyons ici dépasse ce que l’on peut imaginer de loin. Entendre parler de ces déportations n’est pas comparable au fait de voir de nos propres yeux la détresse de nos compatriotes. »
Mme Verdier, après avoir visité les sites d’accueil à Belladère, continue son périple à Ouanaminthe pour constater les conditions de vie des personnes expulsées, en particulier les femmes et les enfants. Elle a annoncé la mise à disposition de ressources pour équiper et aménager les centres d’hébergement temporaires, afin d’offrir un accueil plus digne.
« Nous savons que la situation est critique, mais nous voulons que chaque Haïtien déporté sache qu’il n’est pas seul. Nous sommes à leurs côtés. Certes, les défis sont énormes, mais nous ne baisserons pas les bras. Nous tiendrons leurs mains et nous les accompagnerons dans la mesure de nos moyens », a-t-elle affirmé, avec une rare intensité émotionnelle.
Herwill Gaspard, Ministre délégué à la Solidarité et aux Affaires humanitaires, a pour sa part insisté sur le respect de la dignité humaine dans l’accueil des expulsés. « Ce sont des Haïtiens, des frères et sœurs, qui vivaient à l’étranger et qui, pour diverses raisons, se retrouvent aujourd’hui forcés de rentrer. Il est de notre devoir de leur offrir un minimum vital, un accueil digne, une écoute attentive. »
Selon lui, l’État haïtien doit garantir, à tout moment, un mécanisme d’accueil structuré, capable de répondre efficacement à ce type de crise humanitaire.
Alors que la pression migratoire continue de croître, les autorités haïtiennes se retrouvent face à un double défi : répondre à l’urgence humanitaire tout en construisant une politique publique cohérente pour la prise en charge des déplacés de retour.
Les infrastructures de santé, les centres d’hébergement, le soutien psychologique et les programmes d’insertion socio-économique sont autant de chantiers à mettre en place dans les meilleurs délais. La coopération avec les organisations internationales s’avère plus que jamais cruciale.
La visite de la délégation gouvernementale à Ouanaminthe ne résout pas la crise, mais marque une étape importante dans la reconnaissance officielle de la gravité de la situation. Une reconnaissance indispensable pour mobiliser les ressources nécessaires et redonner un souffle d’espoir aux milliers d’Haïtiens abandonnés aux portes de leur propre pays.
Donald Métellus
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