Une rentrée académique sous tension : Les promesses du gouvernement face à une réalité sombre


Port-au-Prince, le 2 octobre 2024.-

Le mardi 1er octobre 2024, le Premier ministre haïtien, Dr Garry Conille, a visité le Lycée des Jeunes Filles, situé sur le Chemin des Dalles, au cœur de Port-au-Prince, à l’occasion de la rentrée académique 2024-2025. Ce geste, hautement symbolique, aurait dû marquer un nouveau départ pour l’éducation nationale. Pourtant, derrière l'optimisme affiché par le Chef du gouvernement, la réalité du terrain reste préoccupante.

Des mesures sociales annoncées : du concret ou des promesses ?

Lors de son discours, Dr Conille a présenté un ensemble de mesures visant à alléger la situation pour les parents et les élèves. « 2 millions d’élèves bénéficient des ouvrages scolaires, deux cent mille parents auront un accompagnement de 20 mille gourdes chacun, 10 mille professeurs seront formés dans les matières relatives au programme nouveau secondaire, un million d’élèves recevront un plat chaud par jour, 15 nouveaux établissements scolaires sont inaugurés et les fonctionnaires de l’État recevront un 14e mois », a-t-il énuméré avec fierté.

Des mesures qui, en surface, semblent répondre à des besoins urgents. Mais au-delà de ces annonces, le véritable problème auquel fait face le système éducatif haïtien est bien plus profond. En effet, même si le Premier ministre a souligné que le budget du Ministère de l'Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) a été augmenté de 24%, cette hausse ne suffit pas à masquer les failles structurelles du système éducatif haïtien, largement amplifiées par la crise sociopolitique actuelle.


Des écoles toujours occupées : une éducation en péril

L’une des préoccupations majeures exprimées par le Premier ministre lors de sa visite concerne l’occupation des établissements scolaires par des déplacés et des victimes des exactions criminelles. « J’ai une pensée spéciale pour les enfants qui ne pourront pas se rendre à l’école, en ce début d’année scolaire parce qu’ils sont pris en otage par les regroupements criminels », a déclaré Dr Conille, insistant sur l’importance de faire de l’école un espace sacré, même en temps de crise.

Or, cette déclaration résonne comme une triste réalité pour des milliers d’enfants haïtiens, particulièrement dans les quartiers les plus affectés par l’insécurité. Comment espérer une année scolaire réussie lorsque des élèves sont empêchés de fréquenter les salles de classe à cause de la violence des gangs ? Ces mots, bien que marqués par une intention de solidarité, semblent bien peu face à l’urgence de la situation.

Un gouvernement en décalage avec les attentes ?

Les réalisations énoncées par le Premier ministre, bien qu’impressionnantes sur le papier, peinent à convaincre. De nombreux observateurs estiment que ces avancées restent anecdotiques face aux défis monumentaux que traverse Haïti. Si Dr Conille insiste sur l’importance de l’éducation comme moteur du développement, il omet toutefois de mentionner que, sans sécurité ni stabilité politique, toute réforme éducative est vouée à l’échec.

Les critiques ne tardent pas à pleuvoir. Certains soulignent que ce n’est pas un 14e mois pour les fonctionnaires qui sortira le pays du marasme, mais bien des élections démocratiques et des autorités légitimes pour gouverner. Haïti a besoin de rétablir l’ordre, d’assurer la sécurité de ses citoyens et de garantir un environnement propice à l'apprentissage avant de parler de budget éducatif et de formations pédagogiques.

Un appel à la solidarité : une solution suffisante ?

Dr Garry Conille a conclu son intervention en appelant à la solidarité nationale et internationale, en vue de garantir une année académique réussie pour les élèves haïtiens. Mais peut-on vraiment parler de succès lorsque des milliers d’élèves n’ont pas accès à une salle de classe ? Lorsque des parents craignent pour la sécurité de leurs enfants sur le chemin de l’école ?

Ce discours, malgré ses intentions louables, laisse un goût amer. Les belles promesses du Premier ministre risquent de sonner creux si elles ne sont pas accompagnées de mesures concrètes pour rétablir l’ordre et la sécurité dans le pays. Car sans cela, la réouverture des classes pour l’année 2024-2025 ne sera qu’une illusion, un mirage dans un contexte de violence et d’incertitude.

Alors que la rentrée scolaire s'ouvre sous le signe de la précarité et de l’insécurité, les discours politiques peinent à apaiser les inquiétudes des parents et des enseignants. Si l'éducation doit être une priorité, encore faut-il que le pays réunisse les conditions nécessaires pour permettre à chaque enfant de franchir les portes de son établissement scolaire en toute sécurité.

La Rédaction de StandardMania 

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